
Le 3 mai 1989, à 10 h 47 précises, Olivier de Kersauson boucle un tour du monde en solitaire sur son trimaran Un Autre Regard, après 125 jours en mer. Parti de Brest sans sponsor, sans équipage, et avec une médiatisation minimale, il entre dans l’histoire de la navigation en battant de près de neuf jours le précédent record établi par Philippe Monnet. Un exploit à la fois marin, technologique et humain, qui trace une voie nouvelle dans la course au large.
Un défi sans filet dans les quarantièmes rugissants
Kersauson se lance dans cette circumnavigation le 29 décembre 1988, quittant discrètement le port de Brest. Son but : faire le tour du monde à la voile, en solitaire, sans escale ni assistance, en suivant une route traditionnelle par les mers du Sud. Durant 125 jours, il affronte les vagues de douze mètres, les vents violents et l’isolement des grandes latitudes. Il évite les escales, contourne les trois caps mythiques — Bonne-Espérance, Leeuwin, Horn — et gère seul tous les réglages, les pannes et les décisions stratégiques.
Un trimaran taillé pour la haute mer
Un Autre Regard est un trimaran de 23 mètres, conçu pour allier légèreté, robustesse et autonomie. Sa structure composite, son plan de voilure optimisé et sa capacité à encaisser les chocs font de lui un bateau avant-gardiste pour son époque. Il n’est pas pensé pour la performance pure, mais pour résister à la durée et à la violence des mers australes. Kersauson a fait le choix d’un bateau sans compromis, à la fois stable, rapide et fiable, capable de traverser les océans sans relâche pendant plus de quatre mois.
Une navigation sans sponsor ni communication
Ce tour du monde n’a fait l’objet d’aucune promotion. À une époque où la course au large commence à attirer les projecteurs, Kersauson choisit le silence. Pas de sponsor visible, pas de relais presse, pas de dispositif de communication. Son seul objectif est la mer, son seul témoin, le chronomètre. À l’arrivée, le contraste est fort : alors que les records se célèbrent souvent en grande pompe, c’est dans une ambiance sobre, presque intime, que le navigateur retrouve le port de Brest le 3 mai 1989.
Un record authentique salué par les pairs
Le temps de référence de Kersauson est de 125 jours, 19 heures et 32 minutes. Il améliore largement le précédent record, établi en 1988 par Philippe Monnet sur un monocoque en 129 jours, 19 heures, 17 minutes. Ce record sera ensuite battu par Francis Joyon en 2004 en 72 jours, 22 heures, 54 minutes et 22 secondes, mais celui de 1989 reste un jalon : il est le fruit d’un engagement total, sans logistique externe, sans reconditionnement en mer, avec des moyens volontairement limités. Il est aussi reconnu par la communauté nautique comme une performance de rupture : celle d’un navigateur ayant allié tradition et modernité.
L’homme derrière la performance
Olivier de Kersauson n’est pas un coureur comme les autres. Marqué par une approche philosophique de la mer, il considère cette aventure moins comme un exploit que comme un parcours intérieur. La solitude, le silence, la gestion du temps long sont pour lui des alliés autant que des épreuves. Ce tour du monde n’est pas qu’une victoire chronométrique : c’est aussi un manifeste de liberté, de rigueur et de cohérence. En refusant les compromis médiatiques et techniques, il impose une autre vision de la course au large.
En résumé :
- Kersauson boucle son tour du monde en solitaire en 125 jours, battant le précédent record de près de neuf jours.
- Le trimaran Un Autre Regard, long de 23 mètres, est conçu pour la résistance et l’autonomie en haute mer.
- L’exploit s’effectue sans sponsor ni relais médiatique, dans une sobriété totale.
- Le record, officialisé en mai 1989, est reconnu pour son engagement total et ses conditions extrêmes.
- Cette performance marque un tournant entre tradition maritime et innovations modernes en course océanique.
- Kersauson revendique une navigation libre, sans compromis, tournée vers l’essentiel.